Entrée en vigueur de l’action de groupe

13/11/2014
Catégories : Juridique
Mots-clés : Contrats, Commerce/Consommation, Droit des particuliers

Très attendue et médiatisée, la procédure d’action de groupe peut désormais être lancée. Dorénavant, les consommateurs victimes d’une même entreprise peuvent regrouper leurs réclamations et donner mandat à une association pour obtenir, en leur nom, devant les juges, réparation de leur préjudice.

L’action de groupe s’adresse aux consommateurs victimes d’un litige de masse causé par un même professionnel, dont le montant serait trop faible pour qu’une action individuelle soit entreprise devant la justice. Cette procédure est uniquement ouverte aux consommateurs, c’est-à-dire, selon la définition qu’en donne le Code de la consommation, « toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ». Les professionnels et les « non-professionnels » (des personnes morales telles que les sociétés ou les associations) ne peuvent donc pas entamer une action de groupe.

À noter : toute clause ayant pour objet ou pour effet d’interdire à un consommateur de participer à une action de groupe est réputée non écrite.

Pour recourir à l’action de groupe, les consommateurs doivent impérativement contacter l’une des quinze associations de défense des consommateurs agréées au niveau national, qui sont seules habilitées à engager cette procédure pour leur compte. L’action de groupe n’est donc pas directement ouverte aux particuliers et ne peut pas être engagée sans « passer » par une association agréée.

Liste des associations de défense des consommateurs agréées au niveau national : ADEIC, AFOC, ALLDC, CGL, CLCV, CNAFAL, CNAFC, CNL, CSF, Familles de France, Familles rurales, FNAUT, INDECOSA-CGT, UFC-Que choisir, UNAF.

En pratique, le consommateur n’a pas à chercher d’autres consommateurs ayant subi le même préjudice causé par le même professionnel pour pouvoir s’adresser ensuite à une association de défense des consommateurs agréée. Il peut s’adresser directement à l’association de son choix qui va recueillir sa réclamation et se charger de faire, le cas échéant, le rapprochement avec d’autres plaintes similaires. L’action de groupe pouvant être lancée dès que deux consommateurs au moins estiment avoir subi un préjudice résultant du même manquement d’un même professionnel.

À noter : à ce stade, l’association de défense des consommateurs joue un rôle de filtre. Elle reçoit plusieurs réclamations, les examine puis détermine si une action de groupe peut être intentée. Elle n’a pas l’obligation de donner suite aux demandes des consommateurs.

Limitée aux litiges nés de la vente de biens, de la fourniture de services ou de pratiques anticoncurrentielles, l’action de groupe vise à indemniser des dommages uniquement matériels (à l’exclusion donc des préjudices moraux et corporels) découlant des manquements d’un professionnel à ses obligations légales ou contractuelles.

Précision : plusieurs annonces du gouvernement laissent penser que l’action de groupe pourrait, dans l’avenir, être étendue aux litiges liés à l’environnement et à la santé.

Mais, même limité à la réparation des préjudices patrimoniaux, le champ de l’action de groupe reste vaste : produits défectueux, défaut de livraison de biens, clauses abusives, ventes abusivement liées, frais bancaires injustifiés, conditions tarifaires ayant fait l’objet d’ententes illicites, etc.

À noter que l’action de groupe a pour objet de réparer des préjudices individuels de consommateurs placés dans une situation de fait et de droit identique ou largement similaire (abonnés, clients). L’association ne peut donc pas défendre, au travers de l’action de groupe, un intérêt collectif dépassant celui des consommateurs concernés.

La procédure se déroule en deux phases : une phase de jugement sur la responsabilité du professionnel puis une phase d’indemnisation.

Ainsi, saisie d’une réclamation, l’association détermine s’il existe un préjudice dont plusieurs consommateurs seraient victimes. Dans l’affirmative, elle porte l’action de groupe devant le tribunal de grande instance (TGI) dans le ressort duquel le siège social du professionnel se situe.

Précision : l’association peut s’adjoindre, avec l’autorisation du juge, un avocat ou un huissier de justice pour l’assister, notamment afin de procéder à la réception des demandes d’indemnisation des consommateurs et, plus généralement, afin de les représenter auprès du professionnel en vue de leur indemnisation.

Le juge vérifie alors si le professionnel est responsable des manquements reprochés au vu des cas individuels qui lui sont présentés. S’il retient la responsabilité du professionnel, il doit ensuite définir le groupe de consommateurs à indemniser (par exemple, tous les clients d’une société qui lui ont acheté tel produit à telle période) et en fixer les critères de rattachement.

Important : lorsque les manquements reprochés au professionnel portent atteinte au droit de la concurrence, sa responsabilité ne peut être retenue que sur le fondement d’une décision définitive prononcée par l’Autorité de la concurrence, les juridictions nationales ou l’Union européenne.

Puis, il détermine les préjudices susceptibles d’être réparés pour chaque consommateur ou pour chacune des catégories de consommateurs constituant le groupe qu’il a défini, ainsi que leur montant ou tous les éléments permettant l’évaluation de ces préjudices.

Commence alors la phase d’information des consommateurs susceptibles d’appartenir au groupe (via des spots télévisés, des annonces radio, etc.). Phase qui ne peut toutefois débuter que lorsque le jugement sur la responsabilité du professionnel ne peut plus faire l’objet de recours.

Les mesures d’information, qui sont à la charge du professionnel, doivent notamment reproduire le dispositif de la décision (c’est-à-dire la décision proprement dite), les coordonnées de la personne auprès de laquelle chaque consommateur manifeste son adhésion au groupe, la forme, le contenu et le délai pour adhérer à l’association ainsi que la mention que le consommateur ne pourra plus agir individuellement à l’encontre du professionnel en réparation du préjudice déjà indemnisé dans le cadre de l’action de groupe, mais qu’il pourra toujours agir en indemnisation de ses autres préjudices.

Pour être indemnisés, les consommateurs s’estimant concernés doivent adhérer au groupe dans un délai fixé par le juge, entre 2 et 6 mois après l’achèvement des mesures de publicité. À défaut, ils ne pourront plus demander leur indemnisation dans le cadre de l’action de groupe.

Précision : l’adhésion au groupe vaut mandat aux fins d’indemnisation au profit de l’association mais elle ne vaut ni n’implique adhésion à l’association.

Le professionnel, directement ou par le biais de l’association, procède ensuite à l’indemnisation des consommateurs dans le délai fixé par le juge. Sachant que toute somme reçue par l’association au titre de l’indemnisation des consommateurs lésés doit être immédiatement versée en compte de dépôt à la Caisse des dépôts et consignations.

Le juge peut à nouveau être saisi en cas de contestation relative à l’exécution du jugement ou d’absence d’indemnisation de certains consommateurs.

Lorsque tous les consommateurs victimes d’un même professionnel sont identifiés et ont subi un préjudice d’un même montant, il est possible d’ouvrir une procédure d’action de groupe simplifiée.

Précision : il peut s’agir d’un préjudice d’un même montant, d’un montant identique par prestation rendue ou d’un montant identique par référence à une période ou à une durée.

Après avoir statué sur la responsabilité du professionnel, le juge peut, en effet, le condamner à indemniser les consommateurs lésés directement et individuellement, dans un délai et selon des modalités qu’il fixe.

Avant son exécution et lorsqu’elle n’est plus susceptible de recours, cette décision doit faire l’objet de mesures d’information individuelle des consommateurs concernés, aux frais du professionnel, afin de leur permettre d’accepter d’être indemnisés dans les termes de la décision.

Toute action de groupe peut à tout moment faire l’objet d’une médiation à laquelle seule l’association qui a introduit la procédure peut participer.

L’accord ainsi négocié au nom du groupe est soumis à l’homologation du juge, qui vérifie s’il est conforme aux intérêts de ceux auxquels il doit s’appliquer, et lui donne force exécutoire.

L’accord précise les mesures de publicité nécessaires pour informer les consommateurs concernés de la possibilité d’y adhérer, ainsi que des délais et des modalités de cette adhésion.

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