En matière de vente, la loi prévoit que la propriété d’un bien vendu est transférée à l’acheteur dès la conclusion du contrat, peu importe que le prix soit payé ou non. Toutefois, il est fréquent que le vendeur prévoie une clause de réserve de propriété en vertu de laquelle l’acheteur ne devient propriétaire du bien vendu qu’après le paiement intégral du prix et ce, même si le paiement intervient après la livraison. Cette clause lui permet donc de revendiquer le bien au cas où il demeurerait impayé.
Pour que la clause de réserve de propriété produise ses effets, elle doit avoir fait l’objet d’une acceptation explicite de la part de l’acquéreur au plus tard au moment de la livraison du bien vendu. Pour cela, ce dernier doit pouvoir en prendre connaissance facilement. Ainsi, la clause de réserve de propriété doit être établie par écrit. Elle peut être insérée dans divers documents commerciaux émanant du vendeur (bons de commande, bons de livraison, factures, etc.), ou encore dans ses conditions générales de vente.
Mais attention, la clause de réserve de propriété doit apparaître de façon claire quel que soit le support sur lequel elle est insérée de sorte que l’acheteur ne puisse prétendre l’avoir ignorée. À défaut, elle est sans effet et le vendeur perd alors sa garantie.
Le vendeur peut exercer son droit de revendication sur la marchandise vendue avec réserve de propriété lorsqu’il n’a pas reçu le paiement intégral du prix à l’échéance prévue. En pratique, il lui suffit de mandater un huissier de justice pour qu’il procède à une saisie du bien vendu entre les mains de l’acheteur (cas où l’acheteur ne fait pas l’objet d’une procédure collective).
La clause de réserve de propriété présente un intérêt particulier lorsque l’acheteur est placé en redressement ou en liquidation judiciaire, ou fait l’objet d’une procédure de sauvegarde. Dans ce cas, en effet, le vendeur, qui n’a pas reçu paiement de l’intégralité du prix, peut exercer une action en revendication du bien vendu.
Par cette action, il pourra obtenir la restitution du bien vendu. Il dispose ainsi d’un sérieux avantage par rapport aux autres créanciers de l’acheteur qui, pour la plupart, doivent se contenter de déclarer leur créance auprès du mandataire judiciaire, sans grand espoir de se voir un jour payés de leur dû.
L’exercice de l’action en revendication dans le cadre de la procédure collective de l’acheteur est toutefois soumis à trois conditions cumulatives.
D’abord, la clause de réserve de propriété doit avoir été convenue entre l’acheteur et le vendeur par écrit, au plus tard au moment de la livraison des biens vendus à l’acquéreur.
Ensuite, pour que l’action en revendication soit possible, il faut que les marchandises impayées existent en nature au moment de l’ouverture de la procédure collective, c’est-à-dire qu’elles soient identifiables et individualisées entre les mains de l’acheteur. Ainsi, l’exercice de l’action en revendication est impossible lorsque le bien vendu a été transformé par l’acheteur ou assemblé avec d’autres biens.
Précision : la revendication demeure toutefois possible sur les biens mobiliers incorporés dans un autre bien mobilier lorsque leur récupération peut s’effectuer sans dommage pour les biens eux-mêmes et pour le bien dans lequel ils ont été incorporés. Il en est de même pour les biens fongibles, c’est-à-dire qui sont interchangeables les uns par rapport aux autres (par exemple, du blé). Mais aussi lorsque le bien a été détruit ou volé, l’action en revendication s’exerçant, cette fois, sur l’indemnité d’assurance.
Enfin, l’action en revendication du bien doit être exercée auprès de l’administrateur judiciaire dans les trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure collective de l’acheteur. Et attention, passé ce délai, le vendeur ne pourra plus faire valoir son droit de revendication. L’administrateur ou le liquidateur pourra alors vendre le bien au même titre que les autres biens appartenant au débiteur.
L’acheteur n’étant pas propriétaire des marchandises vendues avec réserve de propriété jusqu’au complet paiement du prix, il ne peut pas, en principe, revendre les marchandises. Néanmoins, en pratique, il arrive que l’acquéreur revende le bien, lequel est alors détenu par un sous-acquéreur.
Dans ce cas, on distingue selon que le sous-acquéreur est de bonne ou de mauvaise foi. Dans le premier cas, c’est-à-dire lorsque le sous-acquéreur ignorait l’existence de la clause de réserve de propriété, le vendeur ne peut plus revendiquer les marchandises auprès du sous-acquéreur. Toutefois, il a la possibilité de lui réclamer la créance du prix ou d’une fraction du prix de revente que ce dernier n’aurait pas encore réglée à l’acheteur au jour de la procédure collective, à la condition que le bien ait été revendu au sous-acquéreur dans son état initial. Dans le second cas, lorsque le sous-acquéreur n’ignorait pas que les marchandises avaient été vendues avec une clause de réserve de propriété, le vendeur initial peut exercer l’action en revendication.
Les risques de perte ou de dégradation d’une chose pèsent sur son propriétaire, donc, en principe, sur l’acheteur dès lors que les parties se sont mises d’accord sur la chose et sur le prix.
Mais dans le cas d’un bien vendu avec réserve de propriété, le vendeur restant propriétaire du bien, c’est sur lui que pèse le risque de perte et de dégradation tant que le prix du bien ne lui a pas été versé. L’acheteur chez qui le bien a été livré n’est, quant à lui, tenu que d’une obligation de conservation du bien. Cette obligation étant une obligation de moyens et non de résultat.
Toutefois, il en est autrement lorsque le vendeur a pris la précaution de doubler sa clause de réserve de propriété d’une clause dite de « transfert des risques ». Par cette clause, le vendeur peut transférer à l’acheteur le risque de perte et de dégradation du bien vendu dès le moment de sa livraison, voire de sa remise au transporteur chargé de la livraison. Il s’agit ainsi d’une garantie supplémentaire pour le vendeur.
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