La loi impose aux SARL et aux sociétés par actions (SAS, SA) dont les capitaux propres sont devenus inférieurs à la moitié du capital social de mettre en œuvre une procédure spécifique destinée à la fois à prévenir l’aggravation des difficultés de la société et à informer ses créanciers. Présentation de cette procédure, dont il est important de souligner qu’elle ne s’applique pas aux sociétés faisant l’objet d’une procédure collective (sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire).
Le gérant de SARL, le conseil d’administration (ou le directoire) de SA, le président (ou le dirigeant désigné à cet effet) de SAS doivent, dans les 4 mois qui suivent l’approbation des comptes ayant fait apparaître la perte de la moitié du capital, consulter les associés ou les actionnaires afin de décider, s’il y a lieu, la dissolution anticipée de la société.
Illustration : prenons le cas d’une SARL dont les exercices coïncident avec l’année civile et dont l’assemblée générale annuelle d’approbation des comptes s’est tenue le 26 juin 2014. Si, lors de cette assemblée, a été constatée la perte de la moitié du capital, le gérant devait consulter les associés sur la dissolution anticipée de la société au plus tard le 26 octobre 2014.
Cette consultation des associés s’impose même si, à la date de l’approbation des comptes ou avant l’expiration du délai de 4 mois, la situation de la société a été régularisée (par le biais d’une augmentation du capital, par exemple).
Précision : les conditions et modalités de cette consultation sont celles prévues par la loi et les statuts pour statuer sur la dissolution de la société. Ainsi, dans une SARL, la décision doit être prise par voie de consultation écrite ou en assemblée, et selon les conditions de quorum et de majorité applicables pour toute modification des statuts (majorité des deux tiers des parts sociales pour les SARL constituées à compter du 4 août 2005, les statuts pouvant prévoir une majorité plus élevée). Dans une SA, la décision est prise par l’assemblée générale extraordinaire (majorité des deux tiers des voix dont disposent les actionnaires). Dans une SAS, elle est prise par les associés dans les conditions prévues par les statuts.
Si la majorité ainsi exigée n’est pas atteinte, la société poursuit donc son activité.
À noter : en dépit de la pratique parfois observée, l’objet de la consultation des associés ou des actionnaires – et donc la résolution qui doit formellement être soumise à ces derniers – doit être la dissolution de la société et non pas la poursuite de l’activité.
Si la consultation des associés ou des actionnaires n’a pas eu lieu dans le délai imparti ou si les associés n’ont pas valablement délibéré, tout intéressé peut demander au tribunal de commerce la dissolution de la société.
Mais dans ce cas, le tribunal peut décider d’accorder à la société un délai maximal de 6 mois pour procéder à la consultation des associés ou des actionnaires.
En tout état de cause, le tribunal ne peut prononcer la dissolution de la société si, au jour où il statue, la consultation des associés ou des actionnaires a eu lieu.
Quelle que soit la décision prise par les associés ou les actionnaires à l’issue de la consultation (dissolution anticipée ou poursuite de l’activité), celle-ci doit être :- publiée dans un journal d’annonces légales ;- inscrite au registre du commerce et des sociétés et déposée au greffe du tribunal de commerce du lieu du siège social.
Suite à ces formalités, la mention de la perte de la moitié du capital apparaîtra donc sur l’extrait Kbis de la société.
À savoir : les textes ne précisent pas le délai dans lequel ces formalités doivent être accomplies. Il convient néanmoins que celles-ci soient réalisées rapidement car elles visent à assurer l’information des créanciers de la société.
Si les associés ou les actionnaires décident la poursuite de l’activité, la société devra avoir régularisé sa situation au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation de la perte est intervenue.
Illustration : pour reprendre notre exemple précédent, la société aura donc jusqu’au 31 décembre 2016 pour régulariser sa situation.
Cette régularisation devra intervenir :- soit par la reconstitution des capitaux propres à concurrence d’une valeur au moins égale à la moitié du capital ;- soit par la diminution du capital d’un montant au moins égal à celui des pertes qui n’ont pu être imputées sur les réserves.
En pratique : la régularisation pourra s’opérer par tout moyen : réalisation d’un bénéfice suffisant pour reconstituer les capitaux propres, abandon de créances, augmentation de capital, réduction de capital, coup d’accordéon…
Une fois la situation de la société régularisée, les dirigeants doivent veiller à procéder à une inscription modificative au RCS pour que la mention de la perte de la moitié du capital n’apparaisse plus sur l’extrait Kbis.
Les modalités de cette publicité ayant fait l’objet d’interrogations – du fait du silence des textes sur le sujet – le comité de coordination du registre du commerce et des sociétés (CCRCS) a précisé que la demande d’inscription modificative devait être accompagnée du procès-verbal de l’assemblée ayant constaté la reconstitution des capitaux propres de la société (Avis CCRCS 2013-034 du 17 décembre 2013).
En revanche, cette démarche auprès du greffe n’a pas à être précédée d’une insertion dans un journal d’annonces légales.
Si, dans le délai de 2 ans imparti, la société n’a pas reconstitué ses capitaux propres, tout intéressé peut, là encore, demander au tribunal de commerce la dissolution de la société.
Le tribunal peut cependant accorder à la société un délai supplémentaire de 6 mois maximum pour régulariser sa situation.
En tout état de cause, il ne peut prononcer la dissolution si, au jour où il statue sur le fond, la régularisation a eu lieu.
À noter : le simple fait d’être créancier de la société ne suffit pas en soi à satisfaire à la condition d’intérêt à agir en dissolution de la société.
Outre le risque de dissolution de la société, le non-respect des obligations de consultation et de publicité expose les dirigeants de la société à des sanctions.
Pour ces manquements, le dirigeant engage sa responsabilité civile vis-à-vis de la société et des associés ou actionnaires.
Et dans le cas où la société ferait l’objet d’une mise en liquidation, ces manquements peuvent être qualifiés de faute de gestion du dirigeant justifiant que celui-ci soit condamné à combler le passif social.
Enfin, le non-respect des obligations de consultation et de publicité peut constituer un juste motif de révocation des dirigeants concernés.
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