La procédure de rupture conventionnelle du contrat de travail, qui existe depuis près de 10 ans, est largement entrée dans les mœurs. En effet, plus de 389 900 ruptures de ce type ont été conclues en 2016, soit environ 30 000 chaque mois. La raison de ce succès ? Pour les employeurs, pouvoir « sécuriser » la rupture en la faisant homologuer par l’administration du travail. Pour les salariés, pouvoir bénéficier du versement d’une indemnité qui ne peut pas être inférieure à l’indemnité légale allouée en cas de licenciement tout en ayant droit aux allocations d’assurance chômage.
La procédure de rupture conventionnelle homologuée s’applique à tous les contrats de travail à durée indéterminée (et donc pas aux contrats à durée déterminée), quelle que soit la taille de l’entreprise. Elle peut même, selon les juges, être mise en œuvre durant la suspension du contrat de travail du salarié en raison, par exemple, d’un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, d’un congé de maternité ou encore d’un congé parental d’éducation.
En revanche, la loi interdit de recourir à la rupture conventionnelle pour les départs négociés dans le cadre d’un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) ou d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).
À savoir : la rupture d’un commun accord d’un CDI (hors celle intervenant dans le cadre d’un GPEC ou d’un PSE) ne peut pas prendre une autre forme que la rupture conventionnelle. En effet, toute entente entre employeur et salarié visant à rompre un CDI et conclue en dehors de ce dispositif serait requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L’employeur et le salarié peuvent indifféremment proposer de négocier une rupture conventionnelle. Une proposition qui ne doit cependant pas être faite de manière trop abrupte, car elle risquerait alors d’être fort mal vécue. Il faut, en effet, toujours garder à l’esprit que non seulement les pourparlers de rupture conventionnelle peuvent ne pas aboutir, mais qu’ils peuvent également très bien ne jamais commencer !
Attention : si un employeur prend l’initiative de proposer une rupture conventionnelle à un salarié, cette proposition ne doit pas se substituer à une procédure de licenciement. En effet, si les juges sont convaincus que cet employeur a fait pression sur le salarié pour qu’il accepte une rupture conventionnelle afin d’éviter un licenciement dont la justification pourrait être contestée par la suite, la rupture conventionnelle pourra, le cas échéant, être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Contrairement à la procédure de licenciement, aucun calendrier de discussion n’est imposé par la loi. La seule obligation est d’organiser au moins un entretien au cours duquel employeur et salarié conviennent de mettre un terme à leur collaboration. Mais attention, ils doivent tout de même prendre le temps suffisant pour régler toutes les modalités de la rupture. Il serait, en effet, dommage, une fois le salarié parti, de se rendre compte que le sort de la clause de non-concurrence ou des avantages en nature (véhicule de fonction, téléphone ou ordinateur portable mis à sa disposition…) a été tout bonnement oublié.
Plus généralement, le ou les entretiens préparatoires à la conclusion d’une rupture conventionnelle ont pour objectif de garantir le consentement éclairé de la part du salarié. Il est donc utile de prévoir un compte-rendu écrit, signé par l’employeur et le salarié, récapitulant la teneur de chaque entretien préparatoire.
Conscients que la présence d’autres personnes est souvent utile au bon déroulement d’une négociation, les pouvoirs publics ont prévu la possibilité pour le salarié et l’employeur d’être assistés.
Si le salarié décide de se faire aider, il doit en informer, oralement ou par écrit, son employeur. Dans cette hypothèse, ce dernier peut, lui aussi, se faire assister, à condition de prévenir à son tour le salarié.
La personne désignée par le salarié doit, en principe, faire partie du personnel de l’entreprise. Cependant, en l’absence de représentant du personnel, cette personne peut être choisie sur une liste de conseillers dressée par le préfet, disponible en mairie ou auprès de l’inspection du travail.
Côté employeur, il peut s’agir d’un membre du personnel de l’entreprise ou, dans les entreprises de moins de 50 salariés, d’une personne appartenant à son organisation syndicale d’employeurs ou d’un autre employeur relevant de la même branche d’activité.
Le Code du travail impose la signature d’une convention écrite qui a pour objet de définir les conditions de la rupture. Ce document doit préciser, en particulier, le montant de l’indemnité versée au salarié et la date de la rupture du contrat de travail. En outre, il doit notamment renseigner l’identité et l’adresse des parties, la rémunération versée au salarié au cours des 12 derniers mois, la date du ou des entretiens ainsi que, le cas échéant, l’identité du ou des assistants des parties à l’entretien. Il n’est, en revanche, pas nécessaire d’expliquer les raisons qui motivent la rupture, ni même d’indiquer quelle personne l’a initiée.
Important : il est indispensable d’établir la convention en deux exemplaires de manière à ce que l’employeur et le salarié en détienne chacun un.
À compter de la signature de la convention de rupture, l’employeur et le salarié disposent de 15 jours calendaires (c’est-à-dire en comptant tous les jours de la semaine) pour revenir sur leur décision. Pour être valable, cette rétractation doit être communiquée à l’autre partie par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en mains propres contre décharge.
Précision : qu’elle soit à l’origine de l’employeur ou du salarié, la rétractation n’a pas à être motivée.
L’homologation permet aux pouvoirs publics de s’assurer que la procédure de rupture conventionnelle a bien été respectée (règle d’assistance, délai de rétractation…) et de vérifier que le consentement de l’employeur et du salarié à cette rupture est libre.
Attention : cette procédure revêt une importance primordiale, car elle est une condition de validité de la rupture conventionnelle, ainsi que de l’indemnisation du salarié au titre de l’assurance chômage.
À l’issue du délai de rétractation (et surtout pas avant !), l’employeur ou le salarié doit demander l’homologation de la rupture conventionnelle auprès de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte).
En pratique : la convention de rupture et la demande d’homologation sont rédigées sur le formulaire Cerfa 14598*01. Ce formulaire peut être renseigné directement en ligne sur le site Internet www.telerc.travail.gouv.fr.
L’administration dispose ensuite de 15 jours ouvrables (c’est-à-dire en ne comptant ni les dimanches ni les jours fériés), à partir de la réception de la demande, pour répondre. Sachant qu’en l’absence de réponse dans ce délai de 15 jours, l’homologation est acquise.
Le contrat de travail prend fin à la date mentionnée dans la convention de rupture et, au plus tôt, le lendemain de la réception de la décision d’homologation de la Direccte (ou de l’expiration du délai de 15 jours). Et c’est également après validation de la rupture conventionnelle par l’administration que l’employeur devra remettre au salarié un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation Pôle emploi.
La validité de la rupture, ainsi que son homologation, peuvent être remises en cause devant le conseil de prud’hommes dans les 12 mois suivant la date d’homologation de la convention par la Direccte.
Toute clause insérée dans la convention visant à renoncer à la possibilité de contester la rupture est réputée non écrite. Passé ce délai d’un an, le divorce est définitivement consommé entre l’employeur et le salarié !
Pour mener à bien une rupture conventionnelle, l’employeur et le salarié protégé (délégué syndical, délégué du personnel…) doivent également conclure une convention. Mais attention, ils doivent recourir à un formulaire distinct de celui applicable aux autres salariés (Cerfa 14599*01). Ce formulaire étant ensuite adressé, pour autorisation, à l’inspecteur du travail. Il doit impérativement mentionner la nature du ou des mandats détenus par le salarié.
Attention : le projet de rupture conventionnelle conclu avec un délégué du personnel ou un membre élu ou désigné du comité d’entreprise doit obligatoirement être soumis à la consultation du comité d’entreprise, s’il existe. L’avis de ce dernier devant être transmis à l’inspection du travail en complément de la convention de rupture.
L’inspecteur du travail apprécie alors la liberté du consentement du salarié protégé en effectuant une enquête contradictoire, c’est-à-dire en auditionnant individuellement l’employeur et le salarié.
La rupture conventionnelle devient effective le lendemain du jour de l’autorisation de l’inspecteur du travail, sachant que ce dernier doit statuer dans un délai de 15 jours ouvrables suivant la réception de la demande. Toutefois, il peut ne pas répondre. Dans ce cas, son silence vaut décision implicite de rejet au bout de 2 mois.
Précision : la décision d’autorisation ou de refus de l’inspecteur du travail peut être contestée devant le tribunal administratif.
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